Decarbonisation Transport Routier


Décarboner le transport routier


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Quelle est la situation actuelle ?

L'un des premiers secteurs qui nous vienne à l'esprit lorsque nous parlons de décarboner les transports est le secteur routier. En effet, ce dernier représente la première source de gaz à effet de serre en France contribuant à, environ, 30% du total des émissions de gaz à effet de serre de l'Hexagone et de l'Outre-Mer.

Selon les données de 2016, les véhicules particuliers représentent 53,2% des émissions de gaz à effet de serre liés au transport. Les poids lourds en représentent 21,3%, les véhicules utilitaires 19,1%, et les deux-roues 1,2%.

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Nous ne traiterons ici que du transport routier (en excluant donc le transport aérien, fluvial, maritime, ou encore ferroviaire).

Au niveau mondial, les camions, bus et voitures représentent les trois quarts des émissions liées au transport. Ils ont ainsi généré 5,85 gigatonnes de CO2 en 2016 selon l'AIE. Soit 16% des émissions de dioxyde de carbone de cette année (36,4 gigatonnes).

Evidemment, les émissions de dioxyde de carbone du secteur sont dues aux moteurs thermiques (ou moteur à combustion), très largement utilisés dans nos véhicules. Ceux-ci sont dépendants du pétrole. Décarboner le secteur automobile présente donc deux avantages majeurs :

  • réduire nos émissions de dioxyde de carbone
  • adapter ce secteur à l'épuisement des ressources de pétrole

On comprend donc que la décarbonisation des véhicules routiers se doit d'être un impératif si l'on veut lutter contre le réchauffement climatique et ses conséquences désastreuses.

Véhicules électriques

Face à ce constat, il nous faut trouver des solutions pour décarboner le transport routier.

Plusieurs solutions peuvent être avancées. Généralement, la première à laquelle on pense est l'électrification des véhicules. Elle peut en effet être la meilleure solution, si tant est que cette électricité soit produite de manière décarbonée (nucléaire, énergies renouvelables…).

Aujourd'hui c'est la solution la plus connue du grand public. Les véhicules électriques commencent en effet à gagner de l'importance dans nos sociétés : voitures Tesla, Renault Zoé, et tant d'autres véhicules commencent à conquérir les paysages urbains.

Dans un rapport, l'ADEME (Agence De l'Environnement et de la Maîtrise de l'Energie) estime que, de par l'augmentation du prix du pétrole, les véhicules électriques représenteront 60% des ventes en 2050. Evidemment, il serait souhaitable d'accélérer ce processus par des politiques ambitieuses de renouvellement de notre parc automobile.

Les batteries des véhicules électriques

Impact sur l'environnement

Les véhicules électriques ne sont pas exempts de critiques. Mais ces dernières sont-elles viables ?

Le problème principal régulièrement soulevé a trait à l'utilisation de batteries au lithium. Nous avions déjà partiellement évoqué le sujet de l'extraction de lithium dans un de nos mini-billets.

Actuellement, la majorité du lithium est extrait en pompant des eaux de saumure sous terre et en laissant l’eau s’évaporer dans de grandes cuves, ou directement à l’air dans des marais salants. Le lithium est ensuite séparé de la saumure obtenue par électrolyse.

Les principales sources de lithium se trouvent dans le désert d’Atacama au Chili et dans la plaine saline d’Uyuni en Bolivie. Ce sont deux des endroits les plus dépourvus de vie sur terre !

Tout le désert salé n’est pourtant pas complètement dépourvu de vie.
On peut trouver à certains endroits des étendues d’eau dans lesquelles peuvent vivre des crevettes très résistantes au sel, ou des flamants roses. Les autorités ont donc fait de cet endroit une réserve nationale : la réserve nationale Los Flamingos (image ci-dessous).

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Nous nuancerons donc le propos selon lequel l'extraction et le raffinement du lithium provoqueraient forcément des désastres environnementaux. De plus, les saumures issues d'usines de dessalement de l'eau de mer ou les eaux thermales utilisées par des usines géothermiques pourraient, en France, nous permettre d'extraire du lithium écologiquement.

L'extraction n'est cependant pas sans travers. Le pompage des saumures nécessite de l'énergie, et rejette du CO2 de par les machines utilisées. Il conviendrait donc, dans une optique de décarbonisation de la société, de s'intéresser à une électrification de ces exploitations. Enfin, si la calcination du carbonate de lithium libère du CO2, ce dernier peut être capté.

Si des mines à ciel ouvert de lithium existent (notamment en Australie), des mesures (comme l’électrification de la production que nous aborderons sur d'autres pages) permettent d'en limiter durablement les impacts.

Pénurie de lithium

Certains évoquent une possible pénurie de lithium. En vérité nos réserves de lithium sont très importantes.

Le lithium est le 33ème élément le plus abondant sur Terre. L'USGS (Institut d'études géologiques des États-Unis) dans un rapport estime que les ressources de lithium économiquement exploitables sont de 62 millions de tonnes.

En 2016, la demande globale de lithium était de 201 000 tonnes. En gardant ce niveau de consommation, on aurait du lithium pour 308 ans.

Mais la demande de lithium va très probablement fortement augmenter dans les années qui viennent. En considérant qu'elle augmenterait de 300% (603 000 tonnes), on en aurait, avec les ressources actuellement estimées, pour 103 ans de consommation.

En outre, l'exploitation de lithium marin ou de lithium issu des eaux thermales permettrait de considérablement augmenter le volume de ressources exploitables. On estime les réserves maritimes à 230 milliards de tonnes.

Précisons également que l'on sait recycler le lithium présent dans les batteries automobiles. Cela n'est que peu fait pour le moment car le coût reste élevé et recycler le lithium à 100% ne serait donc pas rentable. En revanche, plus le lithium se fera rare, plus le prix sera élevé, donc plus le recyclage se généralisera, devenant alors rentable.

De plus, nous savons substituer le lithium. Par exemple en utilisant des accumulateurs lithium fer phosphate, moins demandeurs en lithium, des batteries au cobalt, au nickel ou encore, le plus prometteur, des accumulateurs sodium-ion qui reposent alors sur une ressource presque infinie : le sodium, sans parler des batteries au graphène.

L'électrification du parc automobile n'est donc pas limitée par les ressources qu'elle suppose.

Des biocarburants

Une autre solution parfois avancée a trait aux biocarburants. Les biocarburants et biocombustibles couvrent l'ensemble des carburants et combustibles liquides, solides ou gazeux produits à partir de la biomasse et destinés à une valorisation énergétique dans les transports et le chauffage.

Un article du Ministère de l'écologie détaille ce sujet :

Les sucres (glucose ou saccharose) contenus dans les plantes sucrières (betterave à sucre, canne à sucre) et les plantes amylacées (céréales comme le blé ou le maïs) sont transformés en alcool par un procédé de fermentation industrielle.

L’alcool est ensuite distillé et déshydraté pour obtenir du bioéthanol. Les coproduits obtenus lors du processus de production (drêches et pulpes) sont destinés à l’alimentation animale.

Nous savons utiliser des betteraves, de la canne à sucre, des céréales, des algues, du blé ou encore du maïs pour fournir à nos véhicules un carburant décarboné.

Ces techniques sont intéressantes, même si faire fonctionner le parc automobile entièrement avec des biocarburants serait en pratique impossible (les cultures nécessaires à la production de biocarburants pénaliseraient alors l'agriculture alimentaire).

Véhicules à hydrogène

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Nous pouvons également opter pour des véhicules à hydrogène. Ces véhicules utilisent une transformation chimique d'hydrogène comme moyen de propulsion. Un véhicule à hydrogène n'émet pas de dioxyde de carbone en roulant.

On distingue deux types de véhicules à hydrogène :

  • des véhicules à base de pile à combustible, cette dernière convertissant l'hydrogène en électricité. Le véhicule est alors in fine électrique mais l'électricité est produite à partir d'hydrogène. Cette solution offre plusieurs avantages face aux véhicules électriques classiques : temps de recharge court, approvisionnement plus simple, pas de nécessité d'adapter le réseau électrique…
  • des véhicules fonctionnant grâce à un moteur à hydrogène à proprement parler, fonctionnant sur le même principe que le moteur à explosion classique. Encore une fois ces véhicules ne rejettent pas de dioxyde de carbone, ils ne rejettent que de l'eau.

Les véhicules à hydrogène pourraient représenter un substitut intéressant aux véhicules thermiques. Cependant, certains problèmes doivent encore être résolus (prix à l'achat, prix à la pompe, production de l'hydrogène, stockage…),

Comment est produit l'hydrogène ?

Pour que cette solution rentre pleinement dans le cadre d'une politique de décarbonisation, il faut que la production d'hydrogène elle-même soit décarbonée.

Il existe plusieurs méthodes pour produire de l'hydrogène.

Le procédé le plus utilisé pour le moment n'est pas décarboné. Il s'agit du reformage de gaz naturel par de la vapeur d'eau surchauffée. Sous l'action de la vapeur d'eau et de la chaleur, les atomes qui constituent le méthane (CH4) se séparent et se réarrangent en dihydrogène (H2) d'une part, et en dioxyde de carbone (CO2) d'autre part. Ce procédé rejette donc du dioxyde de carbone.

Pour décarboner la production d'hydrogène, il faudrait donc capter ce carbone ou envisager d'autres manières de faire.

Nous pouvons notamment produire de l'hydrogène par électrolyse de l'eau. Nous pouvons en effet décomposer de l'eau (H20) à l'aide d'un courant électrique, ce qui nous permet d'obtenir du dioxygène (02) et de l'hydrogène. Ce procédé permet d'obtenir un hydrogène pur.
Ce processus ne rejette aucun gaz à effet de serre si tant est que la production d'électricité nécessaire à l'électrolyse soit elle-aussi décarbonée.

C'est le cas de cellules photo-électrochimiques qui électrolysent l'eau grâce à l'énergie reçue par le Soleil. Mais la plus intéressante des manières de faire demeure le recours à de petits réacteurs nucléaires modulaires, aussi appelés SMR (Small Modular Reactors).
Il s'agit de réacteurs nucléaires à fission, de taille et de puissance plus faibles que celles des réacteurs conventionnels. Ils sont fabriqués en usine et transportés sur leur site d'implantation. Cela permet de réduire les délais, les coûts, d'accroître l'efficacité du confinement, de la sûreté des matériaux nucléaires. Ils sont particulièrement adaptés à la production d'hydrogène.

Limité par les ressources en platine ?

On entend parfois que le potentiel des véhicules hydrogène serait limité par les ressources en platine, métal utilisé pour la construction de piles à combustible.

Tout d'abord depuis 1960, les quantités de platine nécessaires au regard des performances de puissances ont été réduites d'un facteur de près de 2000.

Quand bien même, le recyclage du platine est très bien maîtrisé. Il monte déjà à 95% (et plus il sera rare, plus il sera recyclé car le procédé gagnera en rentabilité).

En outre, le platine est, lui aussi, substituable. On peut en effet le remplacer par d'autres catalyseurs : graphène, cobalt, tungstène, polymère, nanoparticules et même catalyseurs biologiques à partir d'enzymes.

Enfin, si la question du platine se pose avec les piles à combustible, il n'en est rien pour les moteurs à hydrogène à proprement parler qui ne nécessitent pas de conversion de l'hydrogène vers de l'électrique.

Les ressources de platine ne seront donc vraisemblablement pas un problème pour le développement de l'hydrogène.

Conversion de véhicules thermiques

Plutôt que de renouveler le parc automobile en achetant de nouveaux véhicules hydrogènes ou électriques, il pourrait être intéressant de convertir les véhicules thermiques en véhicules décarbonés.

Transformer un véhicule thermique en véhicule électrique est un processus déjà fonctionnel qui permettrait une décarbonisation plus rapide, plus acceptable, et moins coûteuse.

Transformer un véhicule thermique en véhicule à hydrogène est plus rentable encore, étant donné que le coût important de la batterie n'a pas à être supporté (mais d'autres problèmes doivent encore être résolus, avant que cette solution soit pleinement rentable).

Ce genre de conversion est donc tout à fait abordable, et pourrait être partiellement financée par l'état, dans le cadre de politiques ambitieuses de décarbonisation.

Conclusion

Nous avons évoqué différentes solutions pour décarboner le transport routier : véhicules électriques, recours aux biocarburants, les véhicules à hydrogène, et les solutions de conversion de véhicules thermiques vers des modes de propulsion décarbonés.

Décarboner le secteur routier est tout à fait possible et abordable, d'autant plus efficacement et rapidement si d'ambitieux plans de décarbonisation sont mis en oeuvre.




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